Camille Beaulieu

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Si tu aimes la garderie, tape des mains

Texte pour un concours organisé par La Bonne Mine (octobre 2023) Récit 'Spooky', max. 375 mots

Si tu aimes la garderie, tape des mains

Par Camille Beaulieu 


La main sur la poignée, je me dis que c’est une mauvaise idée. Mais ai-je vraiment le choix? Si je veux dormir cette nuit, je dois récupérer le fichu toutou à la garderie. 

  

À l’intérieur, tout est calme. Je suis saisie par le contraste avec la journée bruyante, énergisante et dois-je dire, malodorante. En tant que directrice, l'accès m’est permis après la fermeture. Une chance. Clara, ma petite de trois ans, a - encore - oublié son toutou Pinou dans la salle de classe des Coccinelles. Pourquoi son papa ne l’a-t-il pas rapporté? Il était juste là. 

 

En pénétrant dans le corridor, j’allume les lumières une à une. J’essuie mes mains moites sur mes jeans. Ce lieu familier, dénué du bourdonnement familier des enfants, me rend mal à l'aise.
 

La salle des Coccinelles est au fond, à gauche. Le bruit d’un robinet qui coule me fait picoter la nuque. Je frotte ma main derrière mon cou. Des gouttelettes de sueur froide glissent sous mes doigts. Un coup d'œil dans la salle de bain. Personne. Je referme l’eau.

 

Une comptine retentit. Celle que je chante souvent à Clara. Une petite voix douce d’enfant. Les poils se dressent sur mes bras, mon cœur s’affole contre ma poitrine. 

  

Aller! Je récupère Pinou et je déguerpis! 

 
Dans l'embrasure de la classe, une fillette me fixe. 

 
— Aaaaah!, que je crie sans faire exprès.

  

Je ne la connais pas. Elle me semble triste. Je m’approche doucement.

 

— Je m’excuse d’avoir crié. Tu m’as fait peur.

  

— Aaaaaaah!! hurle-t-elle à son tour. AAAAAHHHH!!!!


Je recule. Ses yeux deviennent tout noirs. Elle s'avance en tapant fort dans ses mains.

  

— MONTOUTOUPINOU-PINOU!!!!

  

Je me redresse en sursaut dans mon lit. Je distingue les contours rassurants de ma chambre. Les draps doux. Mon mari ronfle doucement. C’est Clara, sûrement, qui m’a réveillée. Elle est à mes côtés. Mon coeur se calme.

 
— Oh Clara, c’est toi.

  

Elle tient son toutou Pinou collé contre sa poitrine.

  

— Maman a fait un mauvais rêve. Toi aussi? Viens, je vais te border dans ton lit.

  

Ma bambine se laisse porter à sa chambre. Son Pinou bien serré entre ses petites mains potelées.

  

J’entonne la chansonnette habituelle.

 
— Qu’est-ce qu’elle voulait, maman?

  

— Mmmm?

  

— Qu’est-ce qu’elle te disait, l’autre petite fille?

Road trip nordique

Texte pour un concours organisé par La Bonne Mine (avril 2023) Récit de voyage, max. 300 mots

Road Trip nordique

Par Camille Beaulieu


À partir de Québec, je roule sur la 138, longeant le fleuve St-Laurent. Direction : Côte-Nord. 

Le blizzard hivernal laisse tomber la neige en flocons denses. Les nuages sur la chaussée forment un épais brouillard. 


Je devine que la vue du fleuve à partir du chemin sinueux serait magnifique si elle n’était pas obstruée par les intempéries. 


Mes oreilles bouchent et débouchent à intervalles réguliers, seul signe de l’important dénivelé. Les mains serrées sur le volant, j’espère garder mon véhicule sur la bonne voie. Impossible d’être certaine où je suis.  


La route 138 est scindée par la rivière Saguenay, à l’embouchure du fleuve, et c’est le traversier Tadoussac-Baie-Sainte-Catherine qui relie les deux tronçons. Les automobilistes se dépêchent de monter sur le bateau. Les vagues sont si hautes qu’elles frappent les pneus des voitures. Je parcours cette route depuis toujours et je n’ai jamais vu une telle tempête. Pour la première fois, je me surprends à écouter les directives de sécurité du navire. Que dit le message enregistré à propos des vestes de flottaison?  


De l’autre côté, la végétation change. Seules des épinettes chétives y poussent. Leurs troncs foncés contrastent avec la neige. On se croirait dans une photo saturée en noir et blanc.  Derrière moi, la traverse ferme. Dangereuse. Les bateaux du Bas-St-Laurent, aussi contraints de rester à leur port d’attache. La route entre Québec et Chicoutimi, le seul autre axe routier possible, est barrée depuis des heures. 


À Baie-Comeau, aucun avion sur le tarmac n’atterrit ou ne décolle du minuscule aéroport. Toutes les voies d’accès sont fermées, trop risquées.  


Dans ces conditions, la Côte-Nord se trouve complètement isolée. Plus personne ne peut y entrer. 


Ni en sortir. 


Je ne sais pas si je me sens angoissée ou rassurée par cette pensée, mais finalement, je suis arrivée. 

Un joyeux petit Noël

Texte écrit pour un concours organisé par La Bonne Mine (déc. 2022) Récit de Noël, max. 250 mots

Un joyeux petit Noël

Par Camille Beaulieu


Have yourself a Merry Little Christmas, ma chansons de Noël préférée.


Je l'écoute en préparant les festivités. Je veux que tout soit parfait, comme quand les enfants étaient minis. Sauf que désormais, je suis seule pour décorer. Les ados ne s'intéressent plus au Père Noël ni aux tours du lutin coquin depuis longtemps, et j'en envoyé mon mari dans le sous-sol. Il me dérangeait en regardant son match de football à la télé. 


''Je vais baisser le son, ça va être festif quand même.''


Non.


Les cadeaux emballés sont déjà prêts à être déposés sous l'arbre. Je suis fébrile des les voir ouvrir leurs présents respectifs. Cette année, ils auront une sacrée surprise!


Sitôt le sapin terminé, je prévois attirer tout le monde dans la cuisine avec les biscuits sablés au chocolat, leurs favoris.


Pendant que j'essaie d'accrocher l'étoile au sommet, la canne de bonbon que je suçote se coince dans ma gorge. La douleur vive, la panique réelle. Je m'effondre sur le plancher. Les biscuits brûlent.


Les enfants dans leur chambre. Le mari au sous-sol. J'étouffe.


Someday soon we all will be together
If the fates allow 


- Maman? Maman est morte!?


- Mais là! Qui va me faire un lift? Et qu'est-ce qu'on mange pour souper?



 Next year all our troubles, will be miles away... 

Jusqu'ici, tout va bien

Texte pour le concours de nouvelle de Radio-Canada (oct. 2022)

 Jusqu’ici, tout va bien

Par Camille Beaulieu


  

« Je ne sais pas si quelqu’un va trouver ça. {Grésillement} Mais si c’est le cas, je veux juste dire que jusqu’ici, tout va bien. Les enfants, euh, ils ne doutent pas de ce qui s’en vient. C’est mieux comme ça, je pense. Ils sont trop petits pour savoir et je veux leur faire passer une belle journée quand même. J’ai préparé leur déjeuner préféré. On est allé jouer dehors un peu. Les enfants ont vu le soleil qui clignote. Ça a commencé ce matin. Ils avaient dit que ça commencerait ce matin. Ils avaient dit de rester à la maison. {Silence} C’est vraiment étrange toutes les couleurs du ciel. Les enfants ont demandé ce que c’était. Je ne savais pas quoi leur dire, alors j’ai parlé un peu de l’espace. Ils ne posent pas d’autre question. Je pense, euh, je pense que c’est mieux qu’ils ne sachent pas ce qui se passe. »


« J’ai entendu à la radio que ça s'en venait. L’internet et le téléphone sont encore coupés. C’est… Je ne sais pas. {Silence} Je ne sais pas ce que font les autres. J’aurais aimé parler à ma mère. J’espère qu’elle est correcte. »


« Le téléphone a sonné tantôt. J’ai pu parler un peu. C'était mon mari. Là-bas c’est commencé aussi. Il a parlé un peu aux enfants. L’appel a lâché après une minute. On n’a pas eu le temps de se dire bye. J’ai de la peine. {Long silence} J’ai de la peine, mais je ne veux pas que les enfants s’en aperçoivent. Ils sont tellement petits qu’ils ne se rendent pas vraiment compte de tout ce qui se passe. Pour eux, la journée est normale. » 


« On est rentré, c’est mieux qu’on reste dans la maison. Dehors c’est... Euh. Je pense, je pense que c’est mieux à l'intérieur. »


« {Grésillement} Je... {Silence} C’est difficile. {Sanglot étouffé} Je ne veux pas que les enfants me voient pleurer. J’ai peur. C’est trop bizarre dehors, les couleurs. C’est super beau, et en même temps je suis terrifiée. Je ne sais pas. {Silence} J’aurais voulu ne pas être seule aujourd’hui. Je veux dire ne pas être seule avec les enfants. Il semble n’avoir personne à l’extérieur. Je n’ai pas vu quelqu’un dehors depuis hier. »


« Les enfants ont fait des cabanes dans le salon avec des draps et les coussins du divan. Ils sont tellement mignons quand ils jouent ensemble, comme ça. Ils sont cachés tous les trois dans leur cabane et… oh le plus jeune pleure je vais aller voir {inaudible}. »


« Il est seulement fatigué, je viens de le coucher dans son lit pour une sieste. J’essaie de leur faire passer une journée la plus normale possible et je pense que je réussis. {Bruit de pas} Je me demande ce que font les voisins. Quand je regarde par la fenêtre, je ne vois personne. Euh... je ne sais pas où est tout le monde. Il n’y a plus de réseau depuis cette nuit, je crois. {Longue pause} Les enfants sont retournés dans leur cabane. »


« Mon enfant du milieu a demandé du McDo pour dîner. J’ai dit qu’on en avait mangé la semaine passée et qu’on ne mange pas du McDo toutes les semaines, dans notre famille. Il a répondu: “Tu as une mauvaise attitude, maman. C’est pas ça les mots que je veux que tu dises. Je veux que tu dises oui.” {Rire} Normalement, j’aurais écrit ça dans son livre de mots d’enfant pour m’en souvenir plus tard. C’est vraiment comme une journée normale pour eux, mais en même temps encore plus le fun que d’habitude. L’expression : ‘Vivez chaque jour comme si c’était votre dernier.’ J’y pense sans arrêt aujourd’hui. Sans arrêt. »


« Maintenant, l’électricité est coupée. Je vais leur donner de la crème glacée pour dîner. Ils vont aimer ça. Pour vrai, on passe des bons moments. Ils ont l’air contents. J’ai installé de la peinture et du papier sur la table. Ils ont fait un gros dégât. On a commencé à ramasser et puis j’ai dit qu’on n’a pas besoin de nettoyer. {Rire nerveux}. J’ai collé des feuilles de papier sur le mur. Ils peinturent dessus. Ça fait tout un dégât sur le plancher. Mais au moins je n’ai pas besoin de nettoyer. {Silence} J’aurais aimé raconter ça à ma mère. Je me demande ce qu’elle est en train de faire. Je pense qu’elle aurait aimé savoir que les enfants vont bien. {Grésillement} Le plus grand essaie de reproduire les mêmes couleurs qu’il voit dans le ciel. Il est vraiment un artiste. Il aurait vraiment pu devenir un artiste. Il est tellement créatif. Il aime tellement dessiner. Avoir su que ça finirait comme ça. Avoir su. {Silence.} Je n’aurais pas eu d’enfants. »


« Juste pour être claire, je ne veux pas dire… Je ne regrette pas d’avoir eu mes enfants. J’aime mes enfants plus que tout au monde. J’ai juste… euh, je suis juste fatiguée, je pense. {Silence} Ça aurait été plus facile avec quelqu’un d’autre. J'espère que je fais ce qu’il faut. Je voudrais savoir comment font les autres. C’est difficile. Les enfants sont tellement petits qu'ils ne peuvent pas comprendre. C’est probablement mieux ainsi, mais en même temps je me sens seule. Finalement, la Covid, ce n'était pas si pire que ça. »


« On a lu toutes leurs histoires préférées. Celle qui parle du pigeon, au moins cinq fois. Ils demandent quand leur père revient. J’ai dit… Je n’ai pas dit {inaudible}. Je leur dis que leur père les aime plus que tout au monde, lui aussi. J’aurais vraiment aimé ça ne pas être toute seule avec les enfants aujourd’hui. J’essaie qu’ils passent du bon temps. Je pense, euh, ils passent une belle journée quand même. Si quelqu’un trouve ça, vous pouvez savoir que les enfants ont eu une belle journée. »


« Ils veulent regarder un film. Les deux plus grands ont trouvé ça bizarre que je dise que la télé ne marche pas aujourd’hui. Je leur ai dit qu’elle est brisée. À la place, on a glissé dans l’escalier, assis sur des oreillers. On a vraiment ri! Ça leur a changé les idées pendant une demi-heure. Mais ça a réveillé le bébé. Ah! Il est vraiment grognon quand il se réveille. Tantôt, je vais allumer des chandelles et des lampes de poche. J’espère que les enfants n’auront pas peur. »


« La radio ne fonctionne plus. J’ai peur. Je ne sais pas si c’est maintenant. J’ai essayé de faire des câlins aux enfants, mais ils veulent juste jouer. C’est correct. Je pense, euh, je pense que c’est peut-être mieux comme ça. Je leur dis tout le temps que je les aime. {Grésillement} J’avais fermé les rideaux, mais finalement je préfère voir à l'extérieur. C’est vraiment tranquille. Les enfants ont trouvé un vieux Lite Brite. Il y a une section qui n'éclaire plus. Le bébé s’amuse à jeter les morceaux. {Silence.} J'espère que maman va bien, elle aussi. »


« Ils ont toujours faim. Ils ont mangé des craquelins et du fromage. Le fromage est encore froid, alors c’est correct, j’imagine. Il reste des pommes. Je n’ai pas pu les laver. Je viens de me rendre compte qu’il n’y a plus d’eau courante. J’essaie de ne pas paniquer. J’aurais aimé qu’il reste de l’eau toute la journée. Les enfants vont être contents d’avoir un congé de bain. Je ne sais pas pourquoi il n’y a plus d’eau. {Longue expiration} C’est le plus difficile de ne pas savoir. Ce matin, il y avait aussi la radio. Il n’y a plus de réseau Internet depuis hier, et le téléphone c’est intermittent, mais au moins, j’avais la radio. Les enfants se chicanent encore pour avoir l’assiette bleue. J’ai dit au plus grand qu’il l’aurait demain. Je me sens tellement mal de leur cacher la vérité. Mais je ne sais pas quoi faire d’autre. J’espère, euh, j’espère que je fais bien ça. Est-ce que je fais bien ça? »


« Ça y’est. {Sanglot étouffé} Le soleil ne clignote plus. Ça veut dire qu’il est éteint depuis 8 minutes et 20 secondes. C’est ce qu’ils avaient expliqué hier. {Longue pause} Les enfants… Ils sont tous en pyjamas avec leurs toutous préférés. Ils les ont placés en rangée. Il reste juste une toute petite place pour moi. Je vais aller me coucher avec eux dans la cabane du salon et leur chanter la berceuse que je leur chante depuis qu’ils sont venus au monde. Je vais les regarder dormir. Les enfants qui dorment, c’est la plus belle image que je peux avoir dans ma tête pour la fin. Mais jusqu’ici, tout va bien. »



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